Sandra : Le 7 avril, je me suis rendu à une réunion POST CROI, qui s’est déroulée à l’amphithéâtre Pierre Marie Curie, à Paris. La CROI c’est une grande conférence internationale sur le VIH/Sida qui se déroule tous les ans aux Etats-Unis. C’est le moment pour les chercheurs de faire un compte-rendu de leurs recherches. Et les professionnels de la santé qui y sont allés, ont souhaité faire un compte-rendu pour nous. J’ai donc croisé des infectiologues, des médecins etc. mais ce qui m’intéressait surtout c’était la parole des personnes séropositives et elles étaient au rendez-vous.
Début de l’enregistrement.
Blandine : Je viens d’une île française. Une belle île.
Sandra : Donc tu habites une magnifique île et tu es venue jusqu’ici, à Paris. Pour quelles raisons ?
Blandine : Je suis venue pour la réunion du CROI parce que je suis assez intéressée en tant que séropositive, pour avoir des retours d’infos sur les nouveaux traitements, sur plein de choses et puis je suis venue surtout par curiosité.
Sandra : Quel est le sujet qui t’a le plus intéressé ce soir ?
Blandine : Je dirai que j’étais assez sensible justement à toutes ces nouvelles thérapies qui arrivent par rapport au VCR, c’est-à-dire l’hépatite C parce qu’il y a pas mal de nouvelles choses qui arrivent et c’est intéressant au niveau des molécules. Après j’ai été assez interpellée par la PrEP. Cette façon de traiter les gens qui ne se soignent pas du tout et qui grâce à certains médicaments peuvent éviter de contaminer les autres. Ça, c’est vraiment quelque chose qui m’intéresse énormément. Je savais plus ou moins que ça existait mais c’était intéressant d’avoir plus d’infos.
Sandra : La PrEP, ça fait débat, est-ce que tu arrives à te faire un avis. Pour ou contre la PrEP ?
Blandine : Je pense que le lieu commun qu’on a tous par rapport au virus, tous les humains, qu’on ait le virus ou pas c’est que l’idée, c’est quand même qui est le moins de virus qui circule, de façon à ce qu’il y ait le moins de gens malades. Parce que nous, on a la chance ici d’avoir des traitements mais par exemple, il y a plein d’autres pays où il n’y a pas de traitement donc du coup si nous, pays occidentaux et riches et porteurs du VIH, on peut effectivement moins transmettre, toutes ces avancées qui font qu’on peut enterrer au moins ce virus-là et faire que les gens soient indétectables, quelque soit leur histoire, fait aussi qu’il y a moins de transmission et que moins il y aura de transmission et plus on ira vers la disparition d’une maladie qui est mortelle, qui est mortelle et qui est encore plus mortelle dans d’autres pays que le nôtre.
Sandra : Aurais-tu un message pour les auditeurs de l’émission de radio Vivre avec le VIH ? Imagine, quelqu’un qui vient de découvrir qu’il est séropositif et qui se sent un peu seul, est-ce que tu aurais un message pour cette personne ?
Blandine : J’aurais envie de lui dire en premier lieu que c’est intéressant d’essayer de trouver la personne qu’on aime le plus et pas forcément garder ça pour soi tout seul trop longtemps parce que ça pèse lourd et puis dans un premier temps, de toute façon, chaque personne qui est confrontée à apprendre “vous êtes séropositif” il y a toujours un choc de toute façon. Donc il y a un sas qu’il faut passer, peut-être un petit peu seul mais je crois que l’être humain il a une ressource énorme et qu’on se sent peut-être très faible mais il faut aussi se dire toujours qu’il y a une force énorme en chaque personne. Et une personne qui se retrouve devant une telle annonce, je pense que ça ne doit pas être évident mais il faut… c’est aussi une chance. Parce que finalement, quand on se retrouve confronté à ses faiblesses, c’est aussi une façon de se dire bon, peut-être que j’ai un peu merdé ou peut-être que je peux rattraper, m’occuper mieux de moi, m’aimer un peu plus moi-même parce que pour moi, beaucoup de maladies et cette maladie-là qui est quand même la maladie de l’amour, c’est aussi parce qu’à la base on ne s’aimait pas tout à fait comme il aurait fallu ou qu’on n’a pas forcément été aimé ou que, ou que, ou que. Mais c’est aussi l’occasion de se dire, premier jour d’une nouvelle vie aussi. C’est quelque chose que j’ai traversé, puis je suis petite, je suis minuscule, même pas 50 kilos, même pas 1m60, minuscule.
Sandra : Et tu pètes la forme !
Blandine : Voilà.
Fin de l’enregistrement.
Sandra : Blandine au micro de l’émission de radio Vivre avec le VIH. Avant d’entendre vos réactions, Rosita et Wilson. Est-ce que vous savez ce que c’est la PrEP ?
Rosita et Wilson : Non.
Sandra : Je vais expliquer pour vous et pour tous les auditeurs qui ne savent pas. La PrEP, c’est la prophylaxie préexposition. C’est le fait de donner à une personne séronégative un traitement VIH qui est le Truvada, avant et après un rapport sexuel, et qui permet d’éviter, à la personne séronégative qui prend ce traitement, d’attraper le virus du VIH. C’est une étude qui est en cours en France, qui s’appelle étude Ipergay et là pour l’instant c’est réservé cette PrEP qu’aux personnes homosexuelles. Et donc il y a beaucoup de débats pour ou contre. À savoir est-ce qu’on accepte qu’une personne séronégative prenne un traitement pour se protéger au lieu du préservatif. Parce qu’en fait, les investigateurs de l’essai ont remarqué que le préservatif ça ne marchait pas tout le temps, parce que les gens ne le mettent pas, et du coup ils proposent une solution alternative qui est la PrEP en complément du préservatif. Ils ne disent pas on laisse tomber le préservatif, ils continuent toujours à faire la promotion du préservatif mais ils proposent aussi ce Truvada. Et donc Blandine a l’air d’être pour. Donc, avez-vous une réaction par rapport au témoignage de Blandine ?
Wilson : Oui, alors beaucoup de choses ont été dites dans son témoignage. Mais moi ce que je retiens c’est le dernier point. L’intérêt en fait de mettre à profit ou d’expérimenter la PrEP. Pourquoi le donner seulement aux personnes gays, homosexuelles ?
Sandra : Je vais te répondre tout de suite, parce que les chercheurs disent que c’est dans cette population qu’il y a le plus de nouvelles contaminations.
Wilson : Oui, bien sûr, c’est dans cette population qu’il y a le plus de nouvelles contaminations mais comme on l’a dit récemment, c’est aussi les hétérosexuels qui se contaminent aussi. Je ne suis pas en train de prendre partie pour les homosexuels ou pas du tout mais on devrait en fait, cette expérience-là, ce traitement-là, il devrait être donné à toutes les personnes qui se contaminent beaucoup plus facilement. On devrait arriver justement à déblayer le terrain, savoir les populations à risque en fait, et le donner en fonction des risques de population, pas en fonction de la sexualité, des uns ou des autres. Ça, c’est le premier point. Maintenant, on aborde un autre point, donner ça aux personnes séronégatives. Je ne vois pas aussi là l’intérêt dans la mesure où, cette étude-là est assez, on est en quelque sorte, on est au balbutiement, on ne connait pas l’impact de ces traitements sur des personnes séronégatives. On ne sait pas qu’est-ce que ça peut créer. Ca peut faire du bien certes mais on ne connait pas l’envers du décor, on ne connait pas les problèmes que ça peut créer par la suite.
Rosita : Pour moi, je trouve que c’est vraiment… en même temps, c’est une bonne chose parce que ça éviterait la contamination mais seulement après comme a dit Wilson, qu’est-ce que ça peut provoquer après ? Parce qu’il y a toujours un retour, c’est ce qu’il faut craindre. Sinon, l’idée est bonne et pourquoi seulement sur des homosexuels ? Il n’y a pas qu’eux qui en ont besoin. Il faudrait penser aux autres.
Transcription : Sandra JEAN-PIERRE
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