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08.04.2016

Discrimination et VIH : 20 ans après l’apparition des trithérapies, ça continue. Actions Traitements dénonce !

Sandra : De retour à l’émission de radio Vivre avec le VIH et nous allons continuer l’émission en parlant des discriminations que vous subissez, oui, que les personnes séropositives subissent encore. 20 ans après l’apparition des trithérapies, Action traitements interpelle les politiques sur la situation préoccupante des personnes vivant avec le VIH. Vous avez listé 6 points en tout. Et donc je propose, à tous ceux qui sont autour de la table de me donner un chiffre entre 1 et 6 et puis si vous me donner le chiffre 2, on abordera le point 2, etc. Ok ?

Yann : 4 !

Sandra : C’est parti, le point 4, ah je crois que c’est ce qu’on vient de parler à peu près, donc on ne va pas trop s’éterniser là-dessus. C’est la meilleure articulation, dans un paysage médical en constante mutation, entre les services hospitaliers et la médecine de ville vers laquelle sont dirigés de plus en plus de patients. Voilà, donc je pense que ça rejoint le débat qu’on a eu avant la pause musicale.

Christian : Oui, je pense qu’il faut signaler une chose. La plupart des médecins hospitaliers, en fin de compte le VIH a toujours été pris en charge de manière hospitalière au départ, la plupart vieillissent, prennent leur retraite, beaucoup de médecins s’en vont, ne sont pas remplacés ou peu remplacés ou remplacés par des gens qui n’ont pas l’expérience de toute l’antériorité du VIH, car en fin de compte, les médecins plus anciens qui ont toute cette antériorité de l’histoire du VIH lorsqu’ils sont confrontés à certains problèmes parce qu’il y a des problèmes de santé qui peuvent se présenter. Une expérience, une référence que n’ont pas ces jeunes médecins qui vont devoir apprendre. Eux, ils arrivent, ils sont bien gentils mais malheureusement ils font ce qu’ils peuvent.

Yann : Et les anciens médecins, les médecins qui ont connu la pathologie dès le début, on peut-être une écoute plus importante du patient aussi.

Christian : Ils ont une écoute et une très grande connaissance. Moi je le vois avec certains médecins avec lesquels j’ai des relations ou mon médecin, effectivement je peux parler de tout parce que je vois que c’est un médecin qui est dans le VIH depuis plus de 20 ans, mais elle a tout vu. Malheureusement elle a tout vu parce que l’époque où les gens mouraient, les gens meurent encore du VIH, faut pas l’oublier, c’est quand même bien qu’on dise que c’est une maladie chronique. Je dirai qu’on est dans la chronicité mais on en meurt encore.

Sandra : Vous interpellez les politiques sur ce sujet mais du coup qu’est-ce qu’ils devraient faire selon vous ? En quoi les politiques pourraient vous aider pour améliorer ce problème ? Pour améliorer la connaissance des nouveaux médecins qui prennent le relais ?

Christian : Alors déjà on transfère de plus en plus la médecine hospitalière pour le VIH sur la ville. Lorsqu’il s’agit d’un problème cardiaque ou autre, on renvoie sur des médecins de ville. Autrefois les personnes séropositives étaient prises en charge globalement dans le centre hospitalier. Ca existe encore mais la tendance est à dire : “écoutez chercher pour un cardiologue pour faire les examens. Vous voulez voir un proctologue ? Vous voyez un proctologue en ville, un dermato en ville. On pousse vers la médecine de ville sur des médecins qui malheureusement n’ont pas cette expérience et cette connaissance qu’il y avait dans les hôpitaux, qu’ il y a encore bien sûr mais qui diminue…

Yann : Faut rappeler aussi que les médecins hospitaliers ont une surcharge de travail énorme et que bien souvent les séropositifs comme nous, à partir du moment où le bilan sanguin, c’est-à-dire les CD4, CD8 sont bonnes, la charge virale est indétectable, ils nous fait comprendre que pour toutes les pathologies et Dieu sait s’il y en a quand on absorbe ces médicaments depuis 20 ans et plus, ils nous renvoient effectivement sur la ville. C’est comme je dis aux membres du Comité des familles, d’où l’importance de trouver, même si ce n’est pas un médecin de ville ou un médecin traitant qui a une grande connaissance VIH, mais de trouver un médecin de ville qui peut comprendre le découlement de toutes ces pathologies qui amènent le VIH, ça me semble très important parce qu’on manque de temps quand on est face à son médecin à l’hôpital qui je crois consacre à peu près 1 quart d’heure par patients.

Sandra : Mohamed tu voulais réagir.

Mohamed : Oui, par rapport à ce que disait Christian, qui les repousse plus vers le privée. C’est ce que j’ai remarqué aussi depuis quelques années, indépendamment du VIH, les gens ne restaient plus hospitalisés et encadrés. Ils revenaient en hôpital de jour et selon comment ça se passait, ils les orientaient vers un centre de soins ou une maison de repos. Mais là je crois que c’est de plus en plus restreint, les gens restent de moins en moins à l’hôpital. Ils vous donnent pour les soins, ils vous reçoivent en hôpital de jour, ils disent revenez dans deux mois. Voilà l’ordonnance et vous revenez dans deux mois. Avant il y avait quand même un encadrement assez… selon ta pathologie, si tu fatiguais ou si tu étais malade, et c’était valable aussi pour le coeur, maintenant ils ne les gardent plus ces gens-là.

Christian : Tous les examens étaient faits à l’hôpital. D’ailleurs il y a normalement l’obligation une fois par an d’avoir un bilan complet. Le problème c’est que selon le centre hospitalier dans lequel on est suivi, ce n’est pas le même type de bilan. Dans un bilan on va y rajouter la procto, dans d’autres, il n’y aura pas. En fin de compte, quand on regarde les bilans qui sont faits… ne nous plaignons pas sur la région parisienne. Pensons aux gens qui vivent en province dans les petites villes, c’est une catastrophe ! Le médecin de ville, il est très gentil, il n’y a pas de problème mais il est désarmé ! Il dit : “Moi qu’est-ce que vous voulez ? Je n’y connais rien”. Et récemment, je parle de ça parce que j’étais sur le nord de la France où je m’occupe de quelques personnes pour lesquelles j’essaie d’apporter de l’aide, de l’information surtout, mais le médecin de ville ne connaissait pas et disait des choses qui étaient vraiment complètement… moi je lui soutenais que c’était lié au VIH et d’ailleurs j’en avais la preuve papier, je lui amenais des documents médicaux qui prouvaient. Il disait : “Ah oui mais je n’ai pas le temps de lire tout ça”. Résultat le patient dans cette petite ville de 15 000 habitants, alors il est suivi dans un hôpital qui est à 40 km, par un gars qui est brave on va dire mais qui a des connaissances, je crois que j’en connais plus que lui dans le VIH et sur les pathologies annexes au VIH. Et en fait, la personne est prise en charge, bon bah on lui fait son bilan biologique, on regarde les CD4, la charge virale, on lui donne un traitement, bon bah aller salut !

Mohamed : Alors que moi, j’ai vu des examens où ils faisaient des biopsies annuellement du foie par exemple, des élastométrie, des examens en région parisienne bien sûr. En province je suis sûr qu’ils mettent un an pour avoir rendez-vous. Façon de parler.

Sandra : Alors, je comprends que ça passionne mais on va être obligé d’avancer pour découvrir les autres points qu’Action traitements aborde. Un chiffre entre…

Alexandre : 2.

Sandra : D’accord. L’accès rendu difficile, à cause de fréquentes ruptures de stock, aux traitements complémentaires mais essentiels pour les PVVIH (vaccins contre l’hépatite B, le pneumocoque ou l’Extencilline par exemple)

Christian : Oui, l’Extencilline qui justement est un traitement qui est pour la syphilis. C’est un scandal. Le laboratoire qui produisait l’Extencilline a arrêter de le produire. Depuis l’année dernière, au mois de juillet, l’AMM (autorisation de mise sur le marché) a été donné à un autre laboratoire pour produire l’Extencilline. Actuellement ce produit on se le procure, qui n’est plus de l’Extencilline, sur un laboratoire qui s’appelle Sigmacillina, un laboratoire italien…

Mohamed : Il est devenu non générique ?

Christian : Non. Il n’y a plus de d’Extencilline en France pour le moment. Aujourd’hui on ne meurt plus de la syphilis mais il y a une recrudescence très importante et beaucoup plus chez les personnes VIH, beaucoup plus. Bah oui parce que déjà il y a… je pense que ça vient du fait qu’il y a un phénomène inflammatoire chez les personnes VIH et ce phénomène inflammatoire fait qu’on est sensible, beaucoup plus sensibles si on rencontre la syphilis ou une hépatite C à l’attraper. Cet Extencilline, le laboratoire qui a eu l’AMM pour le produire l’année dernière ne l’a toujours pas produit. D’ailleurs on ne sait pas pourquoi. J’ai interrogé le laboratoire l’année dernière, la directrice médicale qui m’a dit : “Oh ça devrait sortir”. C’était au mois de juillet, avec un très bon pharmacien qui a monté une association à Paris et qui disait : “Bah écoutez, ça devrait sortir d’ici un mois ou deux”. Et ce n’est toujours pas sorti. La dernière réponse c’est : “Ca va sortir”. Il y a un mois, “ça va sortir”.

Sandra : Donc là aussi les politiques ont du boulot, mettre la pression, voilà.

Christian : Alors qu’il y a une recrudescence de la syphilis et on n’a pas de traitement. On est obligé d’utiliser un traitement qui vient d’un autre laboratoire italien qui pose beaucoup de problèmes parce que c’est un médicament dans lequel on ne peut pas mettre de xylocaine, donc il y a la douleur, il y a des gens qui se trouvaient mal quand on faisait ces injections. Donc là, voilà quelque chose qui est gravissime pour la France.

Sandra : Point suivant. Un chiffre entre 1 et 6. Sauf le 2 et le 4 bien entendu.

Yann : 5 !

Sandra : Alors 5, La situation préoccupante des personnes qui vieillissent aujourd’hui avec le VIH, aucune structure (de type Ehpad) n’étant aujourd’hui préparée à les accueillir. Ce point m’a fait un peu tilté. Je me suis dit c’est quoi l’idée ? Est-ce que c’est de faire des structures spécialisées pour les personnes vivant avec le VIH, est-ce que c’est de faire un ghetto des vieux séropositifs ?

Christian : Non. Ce n’est pas des sidatorium, ok.

Yann : Non, mais la question est juste.

Christian : Très intéressant parce que les cubains l’ont fait. Mais l’ont fait avec une présentation plus soft et en fin de compte j’ai presque réussi à adhérer à leur idée. Bah oui. D’avoir une maison de repos, c’était… on faisait aller des personnes séropositives, ça leur permettait d’avoir une bonne nourriture, d’être bien suivi et d’avoir un traitement avant d’être relâché dans la nature.

Yann : C’était un peu des maisons de fin de vie quoi ? Palliatif…

Christian : Ou temporaire. Les cubains l’avaient fait. Ce n’est pas du tout l’esprit sidatorium comme disait monsieur Lepen. Vieillir avec le VIH effectivement c’est un gros problème parce que quand on vieillit, on se projette tous dans l’avenir et on se dit est-ce que je pourrai rester chez moi ? Est-ce que je pourrai toujours monter mes escaliers ? Est-ce que, est-ce que ? Tant qu’on est jeune on ne s’en pas compte. Quand on commence à vieillir, là on se pose la question et on s’aperçoit qu’il n’y pas d’établissement. Les maisons de retraite, quand elles reçoivent un dossier qui leur est présenté, il y a tellement de demandes, qu’elles reçoivent deux ou trois dossier, bon elles ne vont pas prendre celui qui est séropositif, parce que ça leur pose des problèmes. Ils ne sont pas formés…

Yann : Et la peur de complication en plus avec l’âge…

Christian : Bien sûr. Le personnel entre guillemets soignants d’une maison de retraite, n’est pas formé à ça. Nous, on les a interrogé. Ils ne connaissent pas du tout ce que c’est le VIH. Ils en ont peur ! Pour eux le VIH, d’abord ils ne disent pas le VIH, ils disent le Sida : “Non, non, des gens qui ont le Sida, on n’en veut pas, ils vont contaminer”. Une personne vieillissante qui ne peut plus rester, qui perd son autonomie… parce qu’il y a des séropositifs qui ont plus de 80 ans aujourd’hui, bien sûr ! Moi, j’en vois. S’ils sont complètement autonomes encore, bon, ils peuvent essayer d’avoir l’espoir de rester chez eux, s’ils veulent chercher une maison de retraite traditionnelle, je dis bien traditionnelle, sans un établissement très médicalisé, on ne les prendra pas. Pour en avoir parlé avec certains médecins qui m’ont dit oui, on a réussi à faire entrer une personne dans un établissement médical. Mais je dis une personne ! Le nombre de personnes séropositifs qui vieillissent, il y en a énormément. On vieillit maintenant avec la maladie.

Sandra : Eh oui, grâce aux progrès de la médecine !

Christian : Grâce aux progrès de la médecine. D’abord les chiffres, quand on dit 160 000 ou 150 000 séropositifs, je ne sais pas d’où sortent ces chiffres. C’est des chiffres qu’on sort chaque année. Mais si chaque année, puisque les derniers chiffres c’est 600 séropositifs de plus, ça veut dire… je n’arrive pas à savoir pourquoi on est toujours entre 150 et 160 000 depuis… ça fait des années qu’on sort le même chiffre.

Yann : C’est étonnant.

Christian : Je sais bien qu’il y a des personnes qui décèdent mais quand même ! Le chiffre devrait être plus important. On n’en sait rien !

Mohamed : Certains pays ne donnent pas leur chiffre…

Christian : Il y a des pays où il n’y a pas de séropositif ! Là, je plaisante. En Russie il n’y en a pas.

Mohamed : En Chine non plus…

Sandra : En Corée…

Christian : En Corée du Nord on ne sait même pas. Donc, vieillir avec le VIH c’est une question pour laquelle on a peu de réponse, on a déjà parlé de maison de retraite qui seraient un peu plus orientées pour des gays, ça a été évoqué. Mais qu’est-ce qu’il y a aujourd’hui ? Je crois qu’il y a… on trouve des lieux de ressourcements comme à Gardanne, mais ça c’est du temporaire. Mais si tu veux en vieillisant, tu dis moi je ne peux plus rester chez moi, je veux être dans une maison de retraite…

Yann : Le parcours risque d’être compliqué.

Christian : Même si tu as les moyens. Ce n’est même pas une question d’argent ! C’est une question d’acceptation ! Ils ne sont pas formés donc ils ne veulent pas de séropositifs. Sur 3 dossiers qu’on va leur présenter, c’est normal, on les comprend, ils vont dire je prends les deux autres.

Sandra : On arrive bientôt à la fin de l’émission. Je suis désolée. Il y avait 3 autres points qu’on n’a pas pu aborder. Peut-être dans une prochaine émission. Tu reviens quand tu veux. J’ai vu que vous avez interpellé la Ministre de la Santé, pas mal de députés aussi…

Christian : On les interpelle tous.

Sandra : Espérons que ça fasse du bruit. En tout cas, comptez sur nous pour vous aider.

Transcription : Sandra JEAN-PIERRE

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