France Lert : Il y a un hiatus entre ce que vient de dire Barbara, qui est que les femmes séropositives, il n’y a pas de raison qu’elles n’aient pas accès à tous les moyens de contraception dont elles ont envie, besoin et qui leur conviennent et puis ce qui se passe. Ce qui se passe dans les études qu’on a menées autour de Vespa et notamment donc avec Barbara, c’est que ce qu’on voit c’est qu’en fait les femmes séropositives pour, il y a en 20% qui n’utilisent pas de contraception et qui sont sexuellement actives, nous ne parlons pas des femmes qui n’ont pas de relation sexuelle. On parle des femmes qui sont sexuellement actives, ce qu’on voit c’est que les femmes qui sont sexuellement actives, 20% environ n’utilisent pas de contraception ou seulement les méthodes naturelles et abstinence périodique et que parmi les autres femmes ce qui domine c’est le préservatif. Or, le préservatif, et par ailleurs ce qu’on sait, c’est que chez les femmes séropositives, il y a un grand nombre, une grande proportion de femmes qui ont des grossesses non prévues, des grossesses qu’elles ne souhaitaient pas à ce moment ou qu’elles n’attendaient pas. Pourquoi ? Les femmes séropositives donc ont comme moyens de contraception principal le préservatif. Est-ce que c’est leur choix ? On se pose beaucoup de questions parce que ce qui nous semble c’est que les médecins infectiologues d’une part, les gynécologues d’autre part, ne leur posent pas la question : « Madame, de quels moyens de contraception pensez-vous avoir besoin ? Quelles sont vos envies ? Quels sont vos besoins, vos désirs en matière de contraception ? ». Le message de l’étude Vespa et de la connaissance des moyens de contraception c’est de dire infectiologues, gynécologues, associations de personnes séropositives et femmes vous devez vous emparer de la question de la contraception et quand vous voyez votre médecin infectiologue ou médecin gynécologue, lui dire : « J’ai besoin d’une contraception, qu’est-ce qui pourrait me convenir ? Parlons-en, de quoi ai-je besoin ? ». Aujourd’hui le préservatif c’est bien pour la prévention des IST, c’est bien pour la transmission du VIH. On sait bien qu’avec l’efficacité des traitements, on va se dire qu’une femme traitée, elle a moins de risque de transmission donc peut-être qu’à certains moments elle va pouvoir se passer du préservatif. Quelle contraception elle va utiliser ? On a vu que tout est possible y compris le stérilet, l’implant, tout est possible. C’est une question individuelle mais il faut absolument que tous se sentent responsables de dire oui, moi aussi, à moi aussi s’applique le principe de la meilleure contraception pour moi, c’est celle que je choisis, c’est celle qui me convient, parlons-en, de quoi ai-je besoin ? Et je crois que ce qu’on a pu voir dans les réunions qu’on a faites avec des femmes du Comité des familles ou à AIDES par exemple c’est que les femmes n’osent pas parler de leur contraception, n’osent pas dire le préservatif je ne peux pas vraiment compter dessus parce qu’on ne l’utilise pas toujours, parce que je ne me sens pas tranquille, parce que, etc. Je pense que ce qu’il faut c’est que tout le monde se dise : « Oui, la contraception c’est un objectif en soi pour chaque femme, couple séropositif »
Yann : Et qu’est-ce qui fait qu’il y a un petit tabou autour de la contraception ?
France Lert : Mais parce que tout le monde se dit si jamais elles prennent une contraception médicale…
Yann : Ça va être une marie-couche-toi-là ?
France Lert : Non, non.
Sandra : Elles n’utiliseront pas le préservatif.
France Lert : Elles n’utiliseront pas le préservatif. Or, moi je pense que les gens c’est leur responsabilité, c’est leur choix. Et donc il faut absolument que la question de la contraception soit posée pour elle-même. La question du préservatif c’est bien pour les IST, c’est bien pour la non-transmission du VIH mais la contraception très efficace c’est plutôt les méthodes médicales, si c’est votre choix en tant que femme, le médecin doit dialoguer avec vous sur la contraception qui est le mieux adapté à vos désirs et à votre situation. Si vous avez des risques cardiovasculaires, si vous fumez, si vous avez des saignements, etc. Ça va être différent. Mais il n’y a pas de raison que ce soit différent d’une autre femme. Or, ce qu’on a vu dans l’étude c’est que dans l’étude à laquelle beaucoup de personnes séropositives ont participé, d’ailleurs et merci au Comité des familles de nous avoir aidé à mettre au point le questionnaire de l’étude au moment où on l’a fait, ce qu’on voit c’est que beaucoup de femmes, la plus grande partie de femmes voient un gynécologue dans le cadre de leur suivi VIH parce que vous savez que les examens du col de l’utérus doivent être plus fréquents chez les femmes VIH, il a lieu chaque année et donc la plupart des femmes voient bien un gynécologue qui s’abstient de leur parler contraception ce qui est invraisemblable. C’est ça qu’il faut…
Yann : C’est la partie de médecins quoi surtout…
France Lert : Il y a la partie des médecins mais aussi que les femmes se sentent légitimes de dire, l’utilisation du préservatif ok, je m’en charge mais la contraception, c’est avec le médecin qu’il faut le voir. Voilà.
Sandra : Une dernière question pour vous Barbara. Je suppose que vous posez cette question à vos patientes : « Quelle contraception préférez-vous ? » En général, qu’est-ce qu’elles vous répondent ? Est-ce que c’est le préservatif quand même qui revient le plus souvent ou pas ?
Barbara : C’est vrai que le préservatif revient beaucoup. Toutes les femmes ne souhaitent pas forcément une contraception médicale. En tout cas je suis tout à fait en accord avec France Lert sur le fait qu’il faut que ce dialogue ait lieu. Je ne suis pas militante pour une contraception plus qu’une autre, mais en tout cas d’inciter tous mes confrères, toutes mes consoeurs à ce que la question puisse être posée aux femmes mais également aux femmes, qu’elles se sentent en droit de demander une contraception si leur médecin ne leur a pas posé la question.
Transcription : Sandra Jean-Pierre
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