Inoussa : Bonjour Sandra, je m’appelle Inoussa Sawadogo. Je suis au Comité des familles pratiquement depuis 2 ans, comme médiateur de santé et plus axé éducation thérapeutique.
Sandra : 2 ans ?
Inoussa : 2 mois !
Sandra : Tu as dit 2 ans.
Inoussa : J’ai dit 2 ans ? 2 mois.
Carolina : C’est parce qu’il a l’impression d’être là depuis 2 ans au Comité des familles. Voilà, il est tellement à l’aise. Ca fait 2 ans qu’Inoussa est au Comité des familles (rires).
Inoussa : Ca fait 2 mois et demi. (rires)
Sandra : Bon, à ton tour de te présenter.
Carolina : Donc moi je suis Carolina, je suis au Comité des familles, ça fait 2 semaines, pas 2 ans encore mais bientôt peut-être ! (rires). Et donc moi, je serai la coordinatrice du projet d’éducation thérapeutique en santé au Comité des familles et pour essayer d’organiser les activités du Comité des familles avec toute l’équipe, les membres et aussi de mettre en place le programme d’éducation thérapeutique, qui est un projet du Comité des familles depuis quelques années.
Sandra : Nous allons rentrer dans le vif du sujet. Quel est le thème de votre programme d’éducation thérapeutique ?
Carolina : Le thème, on peut dire qu’on n’a pas forcément un thème spécifique parce qu’en fait l’éducation thérapeutique du patient, d’une personne qui vit avec une maladie chronique, c’est d’aider la personne à vivre mieux avec sa maladie, avec son traitement, au quotidien. C’est l’idée de les aider à promouvoir une autonomie, une qualité de vie. On n’a pas forcément un thème spécifique mais on a un programme personnalisé. On peut dire qu’on va essayer d’écouter les gens qui vont venir nous rejoindre dans notre programme pour les aider à mieux vivre avec leurs maladies, leurs traitements. Donc après, on a plusieurs thématiques qui vont faire partie des séances collectives mais tout d’abord, on va faire ce qu’on appelle un diagnostic éducatif, donc d’essayer de comprendre avec les personnes quelles sont leurs besoins et à partir de ça, on va monter un programme personnalisé pour chaque personne qui va participer au programme.
Inoussa : L’éducation thérapeutique du patient apporte comme nouvelle approche l’autonomie du patient. Il n’y a pas un meilleur spécialiste de sa maladie que le patient lui-même et que le professionnel de santé ou l’agent formé qui est souvent devant lui, ne peut pas apporter toutes les réponses à sa situation. Pourquoi ne pas mettre en valeur les compétences du patient, les ressources propres du patient et faire quelques transferts de compétence, de connaissance des agents formés, que le patient pourrait utiliser pour résoudre un temps soit peu lui-même ses propres difficultés et anticiper la réflexion et co-construire quelque chose qui va l’aider à vivre au mieux avec sa maladie avec l’équipe qui le prend en charge. C’est un peu l’intérêt de l’éducation thérapeutique. Quand on rencontre un patient, on identifie avec lui ses besoins mais aussi ses ressources. Qu’est-ce qu’il a besoin pour vivre au mieux avec sa maladie dans sa vie de tous les jours à la maison ? Au travail ? Ensemble, on va essayer d’identifier aussi ses ressources, qu’est-ce qu’il connait déjà, qu’est-ce qu’il a déjà, sur quoi on peut s’appuyer pour l’amener à être plus efficace dans la gestion propre de sa maladie. Je vous prend un exemple, un patient qui est dans un programme d’éducation thérapeutique quand il reçoit par exemple ses résultats de CD4. Il peut déjà se poser la question, l’examen passé, mes CD4 étaient par exemple de 500. Et cette fois-ci mes CD4 sont à 200, ou mes CD4 sont à 800. Qu’est-ce que je peux faire ? Qu’est-ce qui s’est passé dans ma vie ? Dans mon comportement qui a pu favoriser ou défavoriser l’augmentation des CD4 qui sont les cellules indicateurs des capacités des défenses de l’organisme. Ca, c’est un peu ce qu’on a comme une partie de l’activité.
On peut aussi se dire, un patient qui a du mal à vivre avec sa maladie, à construire sa vie avec sa maladie parce qu’il a honte du regard des autres, il a honte de s’affirmer dehors avec sa maladie, on peut se dire, comment est-ce qu’on peut l’accompagner à développer sa confiance en soi, sa capacité à résoudre ses propres problèmes et lui rendre quand même toute cette autonomie là qu’il avait avant qu’on lui déclare qu’il est personne vivant avec la maladie. Voici un peu concrètement qu’est-ce qu’on peut tendre vers avec un programme d’éducation thérapeutique.
Sandra : Donc, en fait, ça consiste concrètement, une personne va venir à l’association et vous allez échanger avec elle ? Inoussa dit non de la tête mais, je donne la parole à Carolina.
Carolina : L’objectif, les premiers pas pour le programme d’éducation thérapeutique, c’est d’échanger évidemment avec la personne Inoussa (rires). Bien sûr qu’on va le faire.
Inoussa : C’est les premiers pas.
Carolina : C’est les premiers pas et du coup on va, comme Inoussa a dit, essayer d’identifier avec ces personnes-là, quels sont leurs besoins. Ca peut être comme Inoussa a dit, une difficulté de comprendre comment je vais interpréter mes résultats biologiques ou comment je dois prendre mon traitement. Ca peut être aussi des difficultés psychosociales, des relations. Ca peut être une palette des besoins que la personne a et du coup, l’idée initiale c’est d’identifier avec ces personnes-là les besoins qu’elle a. Ca, c’est les premiers pas. C’est individuel donc tous les programmes d’éducation thérapeutique c’est personnalisé. C’est la personne qui vient, on échange ensemble, donc l’équipe des éducateurs et la personne et ensuite, on va établir des séances collectives pour parler des sujets qui peuvent intéresser cette personne-là. Donc ça, c’est un peu le programme, une séance individuelle, des séances collectives pour partager nos connaissances et la connaissance du patient parce que c’est comme Inoussa a dit, il y a des connaissances qu’on n’a pas et que la personne a. Donc c’est un échange, c’est un apprentissage pour tous. Et à la fin, cette évaluation, un bilan pour dire, nous on a appris ça, toi, tu as appris ça et qu’est-ce qu’il faut faire à partir… donc c’est d’aider la personne à réfléchir sur son projet de vie, sur ses envies. C’est un programme qui essaye d’être complet dans la vie de la personne, le traitement, les besoins psychosociaux, les projets de vie. C’est découvrir d’être un support pour que la personne puisse être mieux avec sa vie, avec la maladie.
Sandra : Ca a l’air super sérieux, mais pendant votre séance de travail, je vous voyais en train de jouer. C’est ça votre éducation thérapeutique ?
Inoussa : Oui, la particularité de l’éducation thérapeutique par rapport à la palette d’activité proposée aux patients pour les accompagner, c’est d’utiliser des outils. Dans l’éducation thérapeutique, nous sommes au-delà du conseil, nous travaillons concrètement des compétences pour transférer une connaissance et une compétence, une façon d’agir d’une personne qui maîtrise quelque chose à une personne qui est dans le rôle de l’apprenant. Nous sommes en train jouer parce que nous utilisons des outils comme médiateur, dans ce transfert de compétences. Avec un outil le plus banal que les gens ont l’habitude de voir, c’est la boite à image qu’on utilise à partir des images, expliquer une situation. Nous avons aussi pas mal d’outil qui peuvent aider à parler des activités de la vie, le relationnel, les compétences en terme de communication, les compétences en terme de gestion de la maladie, comment gérer la prise des traitements sur un lieu de travail, dans un programme d’une journée de voyage, ainsi de suite.
Carolina : Tu as dit que nous étions en train de jouer, parce qu’en fait, quand on dit éducation thérapeutique du patient, ça fait très sérieux, je suis d’accord avec toi et en fait je pense que tout le monde a eu déjà une expérience, un rapport avec l’école. Et ça ne s’est pas toujours très bien passé. Il faut le dire (rires).
Inoussa : Moi en premier !
Sandra : Moi non, j’aimais beaucoup l’école.
Carolina : Il y a des gens qui ont aimé mais c’est vrai que c’est dans un cadre, quelque chose de très rigoureux, il faut passer des notes, après il faut rattraper si ce n’est pas bien. Et dans le domaine de l’éducation thérapeutique, on a pris le mot éduquer le patient mais en fait c’est un rapport ludique. Dans un rapport de jeux, d’échange. On apprend évidemment, parce qu’on est là pour ça. L’éducation thérapeutique croit ça, qu’on peut apprendre jusqu’à 90 ans, jusqu’à la fin de notre vie. On est toujours des êtres humains et on a toujours la possibilité d’apprendre quelque chose mais d’une façon ludique. Dans notre programme, quand on dit éduquer le patient, il n’y a pas forcément des notes, moi j’ai eu 20/20, il n’y a pas ça. Donc c’est plutôt dans un domaine où on jouer ensemble, on va apprendre tout en pouvant rigoler. C’est dans un cadre convivial. C’est comme un cursus parce qu’il y a le côté sérieux, il faut quand même, on propose quelque chose, c’est dans le domaine de l’apprentissage, donc il faut s’engager, il faut être là, à l’écoute dans une possibilité d’échange mais il n’y a pas forcément une note qu’on va donner à la fin.
Sandra : Celui qui gagne, ce n’est pas forcément celui qui a le plus de CD4 ?
Inoussa : Non.
Sandra : C’était une blague, il fallait rire ! (rires).
Inoussa : Celui qui gagne, c’est celui qui aurait amélioré sa qualité de vie avec le traitement et la maladie. C’est le but.
Carolina : Oui, l’éducation thérapeutique est fait pour aider les personnes qui ont une maladie chronique, une maladie à longue durée. Donc dans la vie, il y a plein de défis et quand on a une maladie chronique, il y en a encore plus. Et donc, c’est d’aider la personne a surmonter ce défi.
Sandra : Moi, je dis tout aux auditeurs, Inoussa a écrit “démarche en ETP”. Qu’est-ce qu’il y a ? Je dois dire ce mot-là ?
Carolina : Il veut faire de la publicité ! (rires)
Inoussa : Je pense qu’il faut quand même que les gens sachent à peu près comment est-ce que les choses se passent pour le côté sérieux et le côté, qu’est-ce que je peux gagner. L’éducation thérapeutique s’appuie sur une démarche qui est la suivante : on part toujours du diagnostic éducatif, qu’il nous permet d’évaluer les besoins du patient et ses ressources. En évaluant ensemble avec le patient, cette évaluation aussi a l’avantage de permettre aux patients de se rendre compte de certaines choses. De ses propres capacités déjà. Il y a des ressources que nous on a mais on n’est pas conscient qu’on a des ressources. Dans l’évaluation, le patient va prendre conscience de ses propres ressources mais aussi d’autres besoins dont il n’avait pas conscience et ensemble, à partir de cette évaluation, on va faire ce qu’on appelle une alliance thérapeutique, un contrat. Ce n’est pas un contrat formel signé sur papier. Mais on va s’entendre après cette évaluation, voici ce qu’on a constaté. On part d’un point A à un point B, voici nos objectifs et en fonction des objectifs, voici le matériel, les ressources qu’on va utiliser pour y aller. Après ce contrat, nous allons passer à la phase de mise en oeuvre qui va nous permettre de travailler concrètement nos objectifs pédagogiques. Ce qu’on vise réellement et c’est par l’intermédiaire des outils, des animations, ça peut être individuel, comme ça peut être collectif, ça dépend du bon vouloir du patient et des objectifs qu’on poursuit. A la fin de cette mise en oeuvre, c’est une évaluation encore qui va revenir et nous permettre de nous accorder avec le patient, est-ce qu’on a réellement atteint les objectifs pour lesquels nous nous sommes rencontrés, est-ce que le patient est satisfait, etc.
Sandra : Il y a peut-être des auditeurs qui se disent : “j’ai envie de participer à votre programme ETP, comment on fait ?”
Carolina : Juste pour dire, l’idée d’un projet d’éducation thérapeutique au sein du Comité des familles elle date de quelques années, ce n’est pas quelque chose qu’on a tiré d’un chapeau Inoussa et moi. On est juste là pour faire la mise en oeuvre du projet. Donc il y a déjà eu des réunions, des groupes de travail, pour identifier des besoins.
Si les gens sont intéressés pour y participer, on va commencer à faire les premiers entretiens individuels à partir d’octobre. Vous pouvez nous contacter au numéro du Comité…
Sandra : Tu ne le connais pas ! (rires)
Carolina : 01 40.. non, je ne le connais pas par coeur (rires)
Inoussa : 01 40 40 90 25.
Sandra : Bon élève Inoussa !
Carolina : Mais Inoussa est là depuis 2 ans, faut m’excuser (rires). Donc pour l’éducation thérapeutique, il y a la place pour les mauvais élèves (rires).
Sandra : Et, par exemple, quand il s’agit de femmes, c’est toi qui va les recevoir ? Quand il s’agit d’homme, c’est Inoussa qui va les recevoir ? Ou c’est mixte ?
Carolina : C’est au besoin du patient. S’il a envie de me rencontrer, parce que je suis une femme, il n’y a pas de souci. On est ouvert à dépasser ces questions de genre aussi. C’est bien qu’on soit un binôme homme/femme, ça tombe bien !
Inoussa : Pourquoi n’as-tu pas inversé ta question ? Pour les hommes ne voudront pas rencontrer Carolina…
Sandra : Je suis certaine qu’il y a des hommes qui voudront rencontrer spécialement Carolina mais je n’ai pas voulu tendre de perche là-dessus… ce n’est pas les petites annonces du coeur là, c’est ETP, c’est sérieux ! Ce n’est pas les soirées séromantiques.
Inoussa : N’empêche qu’en éducation thérapeutique, nous pourrons avoir recours aux soirées séromantique pour compléter une compétence de patients. Ce sont des activités un peu transversales qu’on pourra intégrer dans nos processus éducatifs.
Carolina : Au Comité des familles, il y a plein d’activités qui sont très intéressantes, qui parlent de plusieurs choses et en fait, le programme d’éducation thérapeutique il ne faut pas rester enfermer en soi-même donc on va profiter d’avoir tous ces échanges et soirées, rencontres qui existent déjà au Comité des familles pour faire en sorte que le programme d’éducation thérapeutique soit le plus riche possible.
Inoussa : Très souvent quand on parle d’éducation thérapeutique, chez certaines personnes, ça parait péjoratif. “On n’a pas besoin qu’on m’éduque”. Mais au-delà des mots, il y a vraiment des actions qui s’y mènent et ça peut être efficace et bienfaisant pour les patients. Il y a aussi que l’éducation thérapeutique, c’est nouveau en association et le Comité des familles peut être fier d’avoir un programme d’éducation thérapeutique complet.
Carolina : Pour compléter, les programmes d’éducation thérapeutiques sont normalement développés dans les hôpitaux et donc c’est vrai qu’avoir un programme d’éducation thérapeutique dans quelque chose qui n’est pas forcément répandu et donc du coup, quand on dit éducation thérapeutique, c’est un gros nom, on ne sait pas forcément ce que c’est mais on peut parler de la prise en charge, du traitement, de la qualité de vie, de la transmission, de la nutrition, de la santé sexuelle, de la vie familiale, sociale, etc. Donc c’est bien complet.
Transcription : Sandra JEAN-PIERRE
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